Points Clés
- La performance est un comportement
- Aménagez les habitudes de l'équipe si vous voulez changer les performances de l'équipe
- Chaque équipe doit bien comprendre son rôle, les règles du jeu, les objectifs et la stratégie et apprendre de ses échecs pour permettre une meilleure prise de décision à tout moment.
- Soyez patient, ne vous attendez pas à des changements rapides dans votre équipe.
- Elaborez de nouvelles pratiques en réalisant des expériences de petites envergures et limitées dans le temps avec des indicateurs de réussite et des résultats définis précis. Cela aidera votre équipe.
Dans un environnement professionnel on parle souvent de performance notamment quand on aborde le cadre de l'équipe. On parle d'améliorer les performances de l'équipe, d'analyser les problèmes de performance. On crée des objectifs pour suivre les performances, etc. Mais en réalité, combien de fois nous sommes nous demandé ce que signifie la performance ? S'agit-il de chiffres que nous collectons ? S'agit-il de métriques ? Quelle sorte d'alchimie se produit dans les équipes très performantes ? Comment améliorer les performances de l'équipe finalement ?
On pourrait imaginer une équipe de football comme un exellent exemple de ce qu'est une équipe très performante. On peut voir la performance comme le résultat d'une fin de match sur un tableau d'affichage. 3-0, vous avez gagné !
Et c'est ce que nous regardons trop souvent en entreprise lorsque nous évaluons les performances d'une équipe : tableaux de bord, métriques et chiffres. Nous y attachons trop d'importance. Et nous faisons tout pour que nos équipes se focalisent sur les résultats.
Imaginez un joueur de foot qui court sur le terrain et qui, à la place de frapper la balle ou de prendre la bonne position, regarde les résultats sur le tableau d'affichage. Arriverait-il vraiment ? Serait-il capable de changer la donne ? Vous connaissez la réponse. Ainsi, en tant que leader, nous devons déplacer notre attention du tableau de bord vers le terrain si nous voulons améliorer les performances de l'équipe.
La performance ne correspond pas au résultat affiché sur le tableau de bord. C'est quelque chose que vous faites d'une certaine manière à un moment donné.
La performance est un comportement. La performance est une décision que vous prenez à chaque instant, comme frapper le ballon au bon moment ou faire une bonne passe à un membre de votre équipe qui peut frapper le ballon.
Mais attendez une minute. Pourriez-vous frapper la balle au bon moment si vous ne connaissiez pas les règles du jeu ? Pourriez-vous faire une bonne passe si vous ne saviez pas qui fait quoi dans votre équipe ? Pourriez-vous prendre la bonne décision si vous ne voyez pas ce que vous essayez d’obtenir ?
Pour rendre les actions de l'équipe efficaces et offrir la meilleure décision à chaque instant (ce qui signifie être très performant), un membre de l'équipe doit avoir une compréhension claire des éléments suivants :
- Rôle des équipes
- Règles du jeu
- Stratégie
- Comment apprendre de ses échecs
Examinons maintenant plus en détail chaque aspect et voyons ce que vous pouvez faire en tant que leader pour optimiser les performances de l'équipe.
Role de l'équipe
Assurez-vous que les membres de votre équipe comprennent clairement qui fait quoi.
- Les membres de votre équipe comprennent-ils le rôle de chacun ?
En effet, vous pensez maintenant - oui, bien sûr, ce n'est pas le premier jour qu'ils travaillent ensemble. Je vous conseille de ne pas tomber dans ce travers et d'enquêter ou de parler avec les membres de l'équipe pour clarifier cette question. Discutez avec eux, posez des questions. Je suis sûre que cette conversation à elle seule vous révélera beaucoup de choses.
Avoir une description formelle des rôles aide grandement les membres de l'équipe à savoir qui fait quoi. Cela permet aussi de minimiser le niveau d'incertitude et d'en tenir compte lors de la planification et de la répartition des tâches. Cependant, avoir des rôles bien définis ne veut pas dire que les employés ne font rien d'autre que les tâches pour lesquelles ils sont rattachées. Pas du tout. Avoir des rôles bien définis va les aider à associer ce qu'ils font avec ceux que vous attendez d'eux en tant que leader, ça leur donnera un aperçu des efforts supplémentaires qu'ils pourront fournir à l'équipe et à vous.
Une définition formelle des rôles ne suffit pas. Dans les équipes très performantes, les gens en plus de leur fonction, aide les autres à atteindre les objectifs du projet. En tant que leader, il est important de créer un environnement sûr où les gens peuvent aussi apprendre à connaître les forces et les faiblesses des autres. Dessinez vous-même, en accord avec votre équipe, une matrice de compétences. Vous pouvez également partager vos connaissances ; ces pratiques aident généralement à mieux comprendre les forces et les faiblesses. Prenons l'exemple d'une équipe avec un déséquilibre entre les efforts de développement et de test. En cas de besoin, les développeurs peuvent prendre en charge une partie de la charge de test afin de s'assurer que le travail est réellement achevé plutôt que de se concentrer sur le développement.
Les règles du jeu
Enseignez et aidez les membres de votre équipe à comprendre les règles du jeu.
- Avez-vous défini des accords de travail en équipe ?
- Quand les avez-vous revus pour la dernière fois avec l'équipe ?
- Prenez-vous le temps d'apprendre à votre équipe comment faire certaines choses ?
Peut-être appliquez-vous un framework spécifique comme Scrum ou Kanban ? Êtes-vous sûr que tous les membres de votre équipe ont la même compréhension de ce cadre ? Est-ce qu'ils sont conscients du comportement qu'on attend d'eux ?
Mais encore une fois, il ne s'agit pas seulement d'avoir des règles de jeu cohérentes. Il s'agit aussi d'avoir une correspondance 1-1 entre l'attente et la réalité.
Les équipes n'ont pas besoin de règles abscons qui n'ont rien avoir avec la réalité. Il est nécessaire, avec l'équipe, de clarifier régulièrement le comportement souhaité avec celui exercé du moment. Des règles claires et cohérentes aident à créer de nouvelles habitudes pour les membres de votre équipe et à appliquer de nouvelles pratiques et approches.
Strategies et objectifs
Définissez et communiquez clairement les objectifs et la stratégie.
- À quelle fréquence parlez-vous avec votre équipe des objectifs et des résultats clés ?
- Les objectifs sont-ils clairs pour chaque membre de l'équipe ?
- Comprennent-ils ce que vous essayez d'atteindre en tant que leader ?
Très souvent, une équipe ayant un problème de performance manque de connaissances en stratégie. Elle n'a pas envie de faire un travail significatif. En tant que leader, vous devez définir un cadre au sein duquel vous allez communiquer régulièrement les objectifs et les relier à la stratégie. Vous devez également être ouvert pour recueillir les commentaires de votre équipe afin de savoir si votre équipe estime ces objectifs réalisables ou non.
Vos objectifs sont peut-être clairs simplement vous ne les communiquez qu'une seule fois par an. Malheureusement, ce n'est pas assez. Il est important de définir une cadence en fonction du contexte de travail afin de se les rappeler ainsi qu'à votre équipe. Concernant les équipes qui travaillent dans un environnement évoluant vite, revisitez les objectifs au moins une fois tous les trois mois voire plus souvent. Par exemple, en programmant des sessions de planification des versions ou des livraisons avec votre équipe.
Passez en revue, une fois tous les 3 mois, avec votre équipe la feuille de route de livraison, les plans de version. Comparez-la avec la vitesse et la capacité actuelles de votre équipe. Discutez des attentes et recueillez les commentaires de votre équipe. Ensuite, utilisez des sessions de révision de sprint et des sessions de planification de sprint pour suivre les progrès. Il peut s'agir simplement d'un joli tableau d'avancement des versions et d'une barre de progression de la feuille de route des fonctionnalités. Avoir un tel niveau de transparence sur les objectifs aide l'équipe à rester concentrée et à comprendre pourquoi elle fait ça.
C'est assez facile à organiser et cela peut s'appliquer même si vous travaillez avec une seule équipe. Si vous travaillez avec plusieurs équipes travaillant sur le même produit, vous aurez peut-être besoin d'un cadre de gestion des objectifs plus complexe en plus de Scrum. D'après mon expérience, cela a plutôt bien fonctionné, j'ai géré la livraison avec plus de 6 équipes avec la méthode Scrum et j'ai, en outre, établi un cadre de gestion des objectifs appelé Objectifs et Résultats Clés (OKR). Les OKR ont permis de mieux gérer les attentes des parties prenantes et de communiquer à l'équipe les objectifs alignés sur ceux des départements marketing, ventes et développement. Lorsque vous établissez un tel niveau d'alignement entre les différents groupes travaillant sur un même un projet, vous diminuez aussi la probabilité des changements qui peuvent surgir d'un coup, cela aidera à diminuer le niveau de stress et à améliorer les performances de l'équipe.
L'équipe doit savoir tirer les leçons de ses échecs
Créez un environnement où il est possible de tomber sans se faire mal. Enseignez à votre équipe à apprendre plus vite et mieux.
Si vous voulez changer les performances de l'équipe, vous devez changer le comportement = ses habitudes.
Mais cela ne suffit pas, vous devez également avoir une idée de ce qu'il faut changer. Parfois, les gens utilisent la formule magique "C'est de leur faute" pour trouver au moins une personne responsable d'un problème. Même une équipe Scrum bien rodée peut aussi être confrontée à ces problèmes. La culpabilité est, bien sûr, une solution rapide mais elle ne résout pas les problèmes à long terme. Lorsque ce jeu des reproches commence, d'un côté les managers commencent à punir ceux qui apportent de mauvaises nouvelles, de l'autre côté, les employés commencent à cacher les vrais problèmes pour se protéger. Et lorsque les erreurs sont cachées et non acceptées il n'y a plus d'espace pour apprendre. Sans une image claire de la réalité, il est assez difficile d'entreprendre des changements pour améliorer la situation. Il est donc de votre responsabilité, en tant que leader, de créer un environnement sûr pour accepter l'échec, car il est directement lié aux résultats de votre projet et au succès de votre équipe. En gros, il s'agit d'un changement de comportement (d'habitude) et vous devez réfléchir à une nouvelle manière de travailler en cas d'échec.
Parlons un peu plus des habitudes, comment elles prennent forme et la mécanique du changement.
Une habitude se forme dans notre cerveau lorsque nous répétons régulièrement une action, un sentiment ou une pensée. Mais que faire si cette façon particulière de penser ou d'agir nous empêche d'obtenir de meilleurs résultats ?
La bonne nouvelle, c'est que la mécanique du changement des habitudes liées à une équipe sont les mêmes que ceux des habitudes personnelles. Mais la mauvaise nouvelle c'est que c'est tout aussi délicat. Pensez à ce qui s'est passé avec votre dernière résolution du Nouvel An.
Le célèbre scientifique russe Ivan Pavlov a élaboré le concept de stéréotypes dynamiques. L'idée en soi est que notre comportement est un ensemble de stéréotypes dynamiques joués par notre cerveau en fonction de la situation. Dans certaine situation, on note des complexes neuronaux. Par exemple, quand vous êtes dans un bar avec un ami, à la maison avec vos parents ou que vous prenez un café au bureau avec un collègue, votre comportement est différent. Pour chaque situation, vous avez formé un stéréotype dynamique qui se met à jouer avec le cerveau en fonction de la situation.
La théorie de Pavlov a reçu une confirmation expérimentale dans les études d'un autre lauréat du prix Nobel, le remarquable neurobiologiste Eric Kandel. Il a montré comment ces réseaux neuronaux se formaient. Il s'avère que lorsque certaines actions sont répétées, les neurones impliqués dans le processus commencent à faire pousser des épines supplémentaires sur leurs processus avec leur aide ; certaines cellules "parlent aux autres".
Cela signifie donc qu'une habitude (la vôtre ou celle de votre équipe) est une connexion physique dans votre cerveau ou dans le cerveau de personnes travaillant ensemble.
Pour se débarrasser d'une habitude particulière, il faut constamment enseigner au cerveau à agir d'une nouvelle manière.
Pensez à apprendre non pas ce qui se passe dans une salle de classe, mais l'expérience que nous tirons de ce que nous faisons.
Définissons d'abord ce qui fait défaut dans l'apprentissage. Imaginez une personne travaillant pendant 30 ans à un même poste de façon régulière. Cette personne a 30 ans d'expérience, mais si nous regardons plus profondément, nous verrons qu'il s'agit d'une année d'expérience répétée 30 fois. Aucun apprentissage. Il n'y a pas d'apprentissage lorsque vous répétez vos actions sans tenir compte des informations qui viennent de l'extérieur.
Un autre type d'apprentissage est l'apprentissage simple ou "apprentissage en boucle unique". 80 % de l'apprentissage que nous vivons est un apprentissage simple. C'est tout un ensemble - à commencer par le sport, l'action mécanique, le développement d'une compétence basée sur l'essai et l'erreur. Il en est ainsi lorsque nous faisons quelque chose et modifions nos actions en fonction du résultat.
Le plus intéressant, c'est ce qu'on appelle "l'apprentissage en double boucle". L'apprentissage en double boucle se produit lorsque vous essayez de voir la situation sous un autre angle. L'apprentissage en double boucle consiste à maîtriser de nouvelles stratégies, de nouveaux types d'actions et d'expériences qui semblaient auparavant impossibles. Par exemple, lorsque vous apprenez à remettre en question vos hypothèses initiales, la capacité de voir la situation d'une nouvelle manière. Ainsi, si vous formez votre équipe à l'apprentissage en double boucle, elle apprendra plus vite et mieux.
Mais il y a autre chose que vous devez garder à l'esprit.
Notre cerveau est un énorme agrégat dans lequel un grand nombre de processus différents se déroulent en parallèle. Le cerveau doit résoudre de nombreux problèmes simultanément - en commençant par le fait qu'il est nécessaire de "dessiner" tout ce que nous entendons, voyons, en terminant par ce que nous pensons, ressentons, percevons. Et cela ne tient pas compte de la régulation du tonus musculaire, du travail des organes internes dont sont responsables d'anciennes parties évolutives du cerveau.
Avec autant de processus différents qui se produisent simultanément, nous devons agir de concert. Nous ne pouvons pas faire plusieurs choses à la fois, bien que nous ayons beaucoup de désir et d'influences externes. Notre cerveau doit tenir compte d'un grand nombre de facteurs et créer une sorte de vecteur de résultats en fonction de ceux-ci. Le cerveau hiérarchise donc les tâches.
Revenons à notre exemple de résolution du Nouvel An. Imaginez que vous essayez de changer un comportement que vous avez depuis des années, depuis l'enfance. Par ailleurs, vous avez décidé qu'à partir de cette année, vous ne mangerez plus de bonbons, vous avez décidé de réduire la consommation de sucre. Mais que se passe-t-il lorsque vous voyez un beau morceau de gâteau ? Vous le mangez. Et votre cerveau vous explique immédiatement : une fois ne fera pas de mal. C'est le principe de la dominance. Un centre nerveux prend le dessus dans la lutte contre les autres réseaux neuronaux et reçoit leur tension. Vous avez donc formé le réseau neuronal pendant des années, et vous vous attendez à ce qu'une seule belle pensée le change. Ça ne fonctionne pas comme ça.
Pourtant, il est inutile de lutter contre les « mauvaises habitudes » sur le front.
Cela aiderait si vous aviez quelque chose de plus, quelque chose de systémique. Pour se débarrasser d'une « mauvaise habitude », il faut apprendre à devenir dominant envers soi ou envers son équipe.
Par exemple, commencez par étudier comment tant de sucre nuit à l'organisme. Ou bien la prochaine fois que vous voulez manger du gâteau, mangez plutôt des fruits. Ainsi, étape par étape, vous formez une nouvelle dominante dans votre cerveau. En connaissant ces ingrédients, nous pouvons neutraliser les éléments qui développent nos habitudes. Et dès que nous les neutralisons, nous privons un réseau de neurones de puissance ; nous allons changer ce pouvoir pour créer un autre dominant. Nous recevrons de l'énergie pour former un nouveau réseau neuronal qui deviendra notre nouveau stéréotype dynamique.
La même mécanique fonctionne avec l'équipe. En tant que leader, nous devons comprendre que la formation d'un nouveau comportement dans un groupe prendra plusieurs cycles. Nous pouvons réussir si nous créons des conditions spéciales au sein de l'équipe pour éviter de répéter les anciens comportements. Si vous avez postulé au moins une fois à un changement d'équipe, vous avez dû remarquer à quel point les gens deviennent défensifs.
Une façon de créer un environnement sûr pour accepter l'échec et l'apprentissage est de mener des expériences de petite envergure, limitées dans le temps, avec des résultats attendus et des indicateurs de réussite précis. Communiquez les avec l'équipe, mettez-vous d'accord sur la nouvelle façon de faire les choses et commencez votre expérience. Assurez-vous que pendant l'enquête, tous les membres de l'équipe suivent le chemin que vous avez vu ensemble. Une fois le temps écoulé, collectez les métriques nécessaires et parlez-en avec l'équipe. Si l'équipe constate une amélioration des résultats, elle continuera à appliquer la nouvelle approche sans même discuter. Mais si les changements décidés ne fonctionnent pas, alors pourquoi continuer à les suivre ? Jetez-les et recommencez :)
En résumé
- La performance est un comportement.
- Aménagez les habitudes de l'équipe si vous voulez changer les performances de l'équipe.
- Chaque équipe doit bien comprendre son rôle, les règles du jeu, les objectifs et la stratégie et apprendre de ses échecs pour permettre une meilleure prise de décision à tout moment.
- Soyez patient, ne vous attendez pas à des changements rapides dans votre équipe.
- Réalisez des expériences de petite envergure et limitées dans le temps avec des indicateurs de réussite et des résultats définis précis. Cela aidera votre équipe à évaluer et à s'améliorer plus rapidement.
Lectures complémentaires, références
- Penser en systèmes, Donella Meadows
La Cinquième Discipline : L'art et la pratique de l'organisation apprenante, Peter Senge - Agile Productivity: Willpower and the Neuroscience Approach, Anna Obukhova
- Teaching Smart People How to Learn, Chris Argyris
- Moving from blame to accountability by Marliyn Paul
A propos de l'auteur
Liana Martirosyan est chef de projet, animatrice d'ateliers, conférencière et coach. Elle aide les individus, les équipes et les organisations à devenir très performants, en gérant des équipes multiculturelles et distribuées dans un environnement complexe en évolution rapide. Elle a une capacité particulière à combiner une concentration sur les résultats avec une attention à la croissance individuelle et au développement d'équipe. Son objectif principal est d'aider les individus et les équipes à se focaliser sur les résultats et à être en mesure de se former plus rapidement et mieux.